LE CONTEXTE
Le 31 juillet 2020, Stephen TATAW est décédé. L’agitation et l’euphorie s’emparent des médias conventionnels camerounais et de la toile, parallèlement sur la toile une bonne partie des internautes se questionnent sur les motifs d’une telle agitation et on a pu lire par exemple « qui est Stephen TATAW ? ». Double choc émotionnel provoqué simultanément par la disparition de ce héros et le fait qu’il y ait des camerounais instruits qui ne savent pas qui était Stephen TATAW. Comment l’un des personnages les plus prépondérants d’une épopée digne de l’Iliade et si récente à l’échelle de l’histoire du monde et de l’humanité pourrait passer pour un inconnu aux yeux de bon nombre de ses compatriotes ?
L’HISTOIRE: LA CONNAISSANCE DU PASSÉ BASÉE SUR LES ÉCRITS.
Les historiens et même un contemporain comme Nicolas Sarkozy ont souvent dit : “l’Afrique n’a pas d’histoire”. On a vu beaucoup de gens s’indigner, sans mesurer la profondeur de ces propos. L’Afrique n’a pas d’histoire vient relever le caractère obsolète de la tradition orale, et le besoin d’inscrire sur la pierre les faits afin que les générations futures puissent se souvenir et ne jamais oublier.
L’écriture est le socle le plus solide de l’histoire, en parlant d’écriture, il n’est pas question de limiter le processus à la construction d’une bibliothèque, mais à la pérennisation de la mémoire et des faits marquants à travers les époques, par des moyens aussi pérenne que les livres. Il est question d’immortalisation tout simplement.
L’immortalisation
On peut aux occidentaux leur reprocher leur chauvinisme, mais le chauvinisme n’est que justice quand il s’agit de rendre des honneurs aux hommes de valeur. Comme illustrations:
– les membres de l’académie française sont surnommés “les immortels” et leurs noms demeurent inscrits pour l’éternité
– Les soldats français depuis Napoléon et les gens morts pour la patrie ont une cérémonie d’hommage à la place des invalides et leurs noms y sont inscrits pour la vie.
– On a les panthéons et les musées aussi qui permettent de préserver la mémoire
– Aux USA, les sportifs populaires voient leur maillots retirés par leurs équipes et entrent aux Hall of Fame et deviennent ainsi immortels.
– On a la journée des pères fondateurs aux USA, la journée Christophe Colomb, des jours fériés comme le jour Martin Luther King, l’Aéroport Roissy Charles de Gaulle du nom du libérateur de la France et du premier Président de la cinquième république, le Stade Chaban Delmas à Bordeaux ancien baron politique en Gironde, le trophée de la coupe du monde de foot qui s’appelle Jules Rimet créateur de la Coupe du Monde de football , le titre de meilleur jour des finales NBA qui porte le nom de Bill Russel le joueur le plus titré de l’histoire de la NBA, tout récemment le titre de meilleur joueur du NBA All star Game qui porte le nom de Kobe Bryant.
– Les champions du monde 98 en France qui ont des rues à leurs noms.
– le titre de meilleur joueur africain du championnat de France porte le nom de Marc Vivien Foe, même là ils l’ont honoré mieux que nous.
Les exemples sont légions, comment peut-on comprendre que TATAW STEPHEN qui était encore Capitaine il y a 26 ans à peine, champion d’Afrique 1988 au Maroc, capitaine lors de 2 coupes du monde 90 et 94 ne soit pas connu? Marc Vivien Foe sera oublié dans 20 ans la jeune génération?
La seule réponse est qu’il n’y a pas eu préservation de la mémoire, ou de l’histoire. Nos pays sont truffés d’Avenue Kennedy, de Lycée Leclerc, Collège Stoll et Bullier. On épiloguait il y’a 2 ans sur le fait de construire une statue à Um Nyobe -rire-. Notre société est encore très assujettie aux besoins primaires hélas et nous pensons que l’argent et les biens matériels suffisent à rendre hommage. Combien de Camerounais peuvent parler de leurs propres ancêtres sur 10 générations en donnant leurs noms?
La tradition orale est certes d’essence negro africaine, mais elle est dépassée il faut bien le dire, ce qui est écrit et marqué ne disparaît pas cependant. Tout ce qui est classique aujourd’hui a été moderne un jour, il faut s’adapter.
On ne peut en vouloir aux Camerounais de célébrer les étrangers mieux que les compatriotes, nous connaissons mieux les étrangers que les compatriotes!
Il est donc impérieux d’imposer un devoir de mémoire, une réforme de l’enseignement de l’histoire, et une immortalisation des grands hommes qui ont marqué de façon indélébile la vie de cette nation du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest.
LE FOOTBALL HALL OF FAME CAMEROUNAIS
Emprunté à la culture sportive américaine et calqué sur cette dernière, il constituerait un panthéon du football camerounais. Il honorera les pionniers, les plus grands joueurs, les plus grandes équipes, les plus grands dirigeants, les plus grands arbitres, les plus grands entraineurs et diverses personnalités du football Camerounais et serait construit dans un endroit fort en histoire pour le football Camerounais notamment la ville de Douala où le football fit ses premiers pas dans les années 1920.
En plus d’immortaliser les légendes, le Football Hall of Fame Camerounais fera office d’Observatoire du football Camerounais, d’office Nationale de Statistiques et de records, de musée.
Qui devrait entrer au Hall Of Fame de façon pragmatique ?
Les pionniers
Les pionniers ici sont les hommes qui ont contribué à l’essor du football au Cameroun, à sa popularisation : Charles Lalanne instituteur et commerçant français installé à Douala en 1918 il a fortement contribué aux premiers pas du football au Cameroun étant propriétaire de l’imprimerie « éveil du Cameroun » ancêtre de la presse du Cameroun qui deviendra Cameroon tribunes et George Goethe agent commercial sierra-léonais arrivé au Cameroun en 1922 qui fonde en 1924 la première équipe du pays le Club Athlétique du Cameroun. D’autres équipent les rejoignirent et furent créer à travers le pays, à cette époque il y avait un seul ballon dans tout le Cameroun et les matches avaient lieu à Douala uniquement et les weekends.
Les équipes
Tout d’abord la première équipe de l’histoire Club Athlétique du Cameroun, à la suite du CAC il faut rappeler que le football appartenait aux équipes de quartiers dans ses débuts notamment les quatre équipes du canton AKWA : Lune des quartiers BONAMUTI, Lion du quartier Bonadibong, Eclair et Zèbre qui étaient des équipes cosmopolites. Lune et Zèbre devinrent Aigle de Douala, Lion et éclair devinrent Caïman.

A la suite des premières équipes on pourrait introduire l’équipe d’Oryx de Douala de 1965 vainqueur de la première édition de la ligue des champions africaines, les équipes du Canon de Yaoundé 1971, 1978, 1980 Championnes d’Afrique, Union de Douala 1979 championne d’Afrique, la sélection Nationale de Septembre 1956 qui fut la toute première et livra son premier match face au Congo Belge, la Sélection Nationale du 13 avril 1960 qui signa la plus large victoire de l’histoire de la sélection face à la Somalie française et c’était le premier match du Cameroun indépendant. La sélection de la CAN 1970 première à participer au tournoi, la Sélection du Mondial 1982 première à participer à la Coupe du Monde et qui termina invaincue, les Champions d’Afrique 1984, 1988, 2000, 2002, 2017, la Sélection du Mondial 1990, les Champions Olympiques 2000, les finalistes de la Coupe des Confédérations 2003 et toutes les équipes ossuc et autres sélections ayant participé de façon établie à l’émergence du football au Cameroun.
Les dirigeants et personnalités
MBOUMOUA ESSENGUE, premier président de Caïman de Douala et père de ETEKI Mboumoua ; Martin OMGBA ZING fondateur du Canon puis du Tonnerre de Yaoundé ; André NGANGUE joueur de Caïman de la première heure qui fut le Premier Président des arbitres ; Ferdinand KOUNGOU EDIMA grand promoteur du football dirigeant Canon de Yaoundé, Colombe de Sangmélima etc… ; l’ancien Ministre de la Jeunesse et des Sports Joseph OWONA ; d’autres dirigeants du football comme Le Général SEMENGUE, Antoine de Padoue ESSOMBA EYENGA ETC…
Les joueurs

ENOUMEDI Guillaume ancien joueur de Caïman et premier capitaine de l’équipe du Cameroun, les différents Capitaine de la sélection nationale fanion Paul NLEND, Rigobert Song, Stephen Tataw, Samuel ETO’O, Benjamin MOKANDJO, Eric Maxime CHOUPO MOTING, Thomas NKONO, OMAM BIYICK, Stéphane MBIA, ABEGA Théophile, Emmanuel MVE ETC…, les ballons d’or africains Samuel ETO’O, Roger Milla, Thomas NKONO, Jean Manga ONGUENE, ABEGA Théophile, Patrick MBOMA, MBIDA Grégoire premier buteur camerounais en Coupe du Monde, Samuel MBAPPE LEPPE premier capitaine à soulever le trophée de la ligue des champions africaines en 1965 avec Oryx de Douala, MBETE Isaac et tous les autres joueurs qui participèrent grandement à l’émergence de notre football.
Les arbitres

Comment ne pas évoquer les noms célèbres d’autrefois parmi les hommes en noir notamment ATANGANA louis de Gonzague, Stanislas KAMDEM, HIOBA HIOBA, Laurent PETCHA, Marcel DJIPENDI, UM BEA, DIALLO BAKAI, et tout récemment l’arbitre international Alioum SIDI.
Les entraineurs

Jean Paul AKONO médaillé d’or aux jeux olympiques de Sidney. Et tous les entraineurs locaux ayant participé de façon établie à l’émergence de notre football.
Les infrastructures
Le stade MBAPPE LEPPE anciennement dénommé Stade AKWA, ce fut le premier stade répondant aux normes et le seul où les matches avaient lieu, c’était aussi le stade de Caiman. Le STADE OMNISPORTS DE Yaoundé, construit à la veille de la CAN 1972, l’équipe nationale fanion du Cameroun y détient le record d’invincibilité à domicile en matchs officiels pour une sélection nationale.
AUTRES METHODES D’IMMORTALISATION
Les dénominations des trophées
Le titre de meilleur dirigeant de club pourrait porter le nom de MBOUMOUA ESSENGUE l’un des premiers dirigeants de club Camerounais
Le titre de meilleur arbitre porterait le nom d’André NGANGUE
Le trophée du plus beau but Camerounais de l’année porterait le nom de Patrick MBOMA
Le titre de Meilleur joueur du Championnat porterait celui de ROGER MILLA
Etc…
Des awards annuels du football Camerounais
Des awards annuels récompensant les footballeurs camerounais sans distinctions de localisation.
Tout comme l’homonymie et les pierres tombales ont pour but de maintenir les souvenirs et de pérenniser les noms, le FOOTBALL HALL FAME CAMEROUNAIS s’inscrit comme une nécessité impérieuse permettant de rendre hommage et d’imposer ces souvenirs à la mémoire collective, ceci n’étant pas l’apanage du football ou du sport, mais de tous les aspects sociaux qui ont guidé l’histoire et la vie de la nation.
Rédigé par Jean Clermont EVINI AVANG.
